Semaine S-4 : Couvrez ce sein que je ne saurais voir ...

Réflexions humoristiques d'une sexa.

Billet

nu-aurore.jpg...Par de pareils objets les âmes sont blessées, Et cela fait venir de coupables pensées. "*
La pudeur est culturelle, si dans l’hémisphère sud certaines tribus se promènent encore naturellement nus, dans les sociétés occidentales plus normalisées la nudité pose problème.
Enfant, dès qu’on n’était plus un bébé, on devait tout cacher, la piscine était un calvaire avec ces vestiaires communs où on devait se contorsionner habilement pour passer de la petite culotte au maillot sans que ce petit triangle et ces jolies fesses musclées ne soient vus d’autres filles qui avaient les mêmes sans compter les gesticulations ridicules pour mettre ou enlever son maillot à la plage enroulée plus ou moins vainement dans la serviette de bain.
Paradoxalement, on ne mettait pas systématiquement de bikinis aux fillettes et je reculai d’ailleurs l’échéance de cet accessoire bustier gênant jusqu’à ce que ma puberté heureusement tardive m’y oblige.

Les années passèrent pendant lesquelles, malgré la révolution sexuelle, mon éducation pudique me fut une entrave régulière imaginant avec horreur les toilettes collectives ou autres saunas nordiques et cachant avec obstination mon corps nu de mes meilleures amies.

Il y a huit ans, une nouvelle amie en (gros) excès pondéral, appelons-la Gorda, et totalement décomplexée tâcha de me convaincre des thalassos "non textiles"** dont elle était adepte régulière.
Je lui ris au nez.
Il était hors de question que j’aille me balader à poil au milieu d’inconnus tout aussi nus malgré les délices promises d’une natation en tenue d’Ève.
- Mais tu rêves !
- Ben quoi, un bout de peau est un bout de peau.
- C’est ça, jamais, plutôt crever !

Sauf que Gorda a de la suite dans les idées, une ténacité digne du morpion mâtiné de SS en manque de victime et une aura mystérieuse qui lui fait accepter n’importe quoi à n’importe qui.
Alternant entre promesses de sensations uniques, de mise en forme corporelle et détente abyssale, ce n’est que la garantie qu’il n’y avait que dans les installations qu’on devait se débarrasser du peignoir protecteur et une déclaration finale lapidaire "Ne te tracasse pas c’est moi qu’on regardera " qui me firent accepter un défi de taille pour la pudibonde Bobonne n’ayant en plus pas apprécié le seul sauna subi en Finlande l’ayant amenée au bord de la suffocation !

Palpitant à 100, bouffée d’angoisse, je pus une dernière fois profiter de mon intimité dans une bien inutile cabine avant de me lancer dans un chemin de croix stoïque !

Première station, le hammam, joliment décoré à la romaine, portemanteau heureusement à un mètre de la porte donnant sur l’espace avantageusement obscur et brumeux où je m’attendais à chaque instant voir apparaître Big Moustache sifflotant "Tea for two", vapeur odoriférante avec dégagement des bronches assuré et décapage au gros sel !

Deuxième station, rafraîchissement dans la piscine, descente prompte afin que l’eau masque de manière bien utopique tous les défauts physiques qui me hantent.
Effectivement la jouissance surprenante de la natation sans maillot est bien là, on en oublierait tous les lézards nus qui prennent le soleil sur les transats tout autour du bassin et qu’on rejoint après quelques longueurs.

Pause lecture, pudiquement emmitouflée dans mon peignoir, seuls le visage, les mains et les pieds vont bronzer, c’est con.

Troisième station, le sauna, chouette, il y fait noir et ça sent bon les herbes au son de musique chamanique. Je ne savais pas que je pouvais exsuder tant d’eau, c’est sûr, pas un point noir n’y résistera !

Quatrième station, le jacuzzi, oui ça fait rêver, sauf quand il est hors sol et que tu dois de nouveau quitter ta carapace en tissu éponge pour monter et redescendre des marches afin de rejoindre d’autres otaries luisantes barbotant dans un cercle de 4 mètres de diamètre, pas question de bulle d’intimité !
Évidemment, si tu oublies ces petits détails, cette variété de jets fait grand bien à tes muscles, il faut l’avouer.

Après l’effort psychologique, le réconfort physique, enfin c’est l’heure de manger un bout.
Malgré une bonne Grimbergen désinhibante, il m’est tout à fait étrange de manger en peignoir et sans culotte !
Le quart de rouge achève enfin de me détendre.

L’après-midi se continue avec pourquoi pas, tant qu’on y est, un bon petit massage sous des mains expertes roumaines mais sans doute exploitées.

A la question qui brûle les lèvres : "Est-ce que ça matte" ?
Je réponds : "Les autres, je ne sais pas, mais moi oui !"
Mais dans un esprit uniquement de curiosité anatomique, attention !
Il faut dire qu’en l’absence de collectionnite mâle aiguë, si on voit beaucoup (trop) de femmes nues ou presque un peu partout dans les médias, l’homme totalement nu est peu visible et surtout consigné aux revues gay.
Alors, oui, Pierre Perret avait raison, la variété de l’aspect de l’appareil masculin reproducteur est sans limite !
Chez les femmes, les seins vont de la cerise au melon plus ou moins fermes et l’épilation pubienne du touffu au ridicule, mais on voit également avec émotion des femmes opérées n’ayant plus qu’un sein profiter en toute simplicité de tous ces réels bienfaits.

Mais d’excitation sexuelle, point, et en quelques séances, effectivement tout paraît naturel et on n’a même plus besoin de cabine pour se déshabiller, heureusement, car certaines thalassos n’en possèdent pas et on se retrouve dans les grands vestiaires de mon enfance sans plus aucune angoisse et avec une aisance dans l’effeuillage qui fait sourire.

Voilà, comment je passai de coincée à libérée et de plus en plus au fur et à mesure des cures non textiles.
Je vous conseille cette expérience qui vous deviendra naturelle avec l’effet pervers que de nos jours je ne supporte que difficilement de nager en maillot en "public textile" !

Gorda me harcèle pour des vacances dans un camp de nudistes, mais là c’est non !

Et je tiendrai bon !

* Molière, Le Tartuffe, III, 2 (v. 860-862)
** Les thalassos parlent de zone sans textile plutôt que naturiste

Notre néo-sexa de la semaine est Véronique D. co-rhétoricienne et médecin généraliste qui avait l’énorme privilège d’habiter une maison mitoyenne à la fois à l’école et au "petit magasin" antre d’achat incontournable de toutes nos fausses faims et gourmandises.