Saison 5.4 : Hernie et compagnie !

Réflexions humoristiques d'une sexa.

Billet


hernie.jpg, oct. 2022

C’était un samedi comme les autres, Bobonne allait chercher son journal, elle fonctionne encore avec cet archaïsme : lire les nouvelles papier et résoudre avec ses petits crayon et gomme de jolis mots croisés et sudoku, la sexa dans toute sa splendeur !

La Cène

Prise d’un double enthousiasme, elle se dit : « Ne gaspille pas le trajet, allez, plante vite, dans un bac de 40 cm de haut déjà rempli de bon terreau bien meuble, les huit petites tagètes achetées la veille en remplacement des précédentes que tu as laissé crever ».
Ouille!
Qu’avait-elle fait là ?
Une douleur la cisaille, mais non ?
Une vengeance posthume de la gent végétale ?
« C’est pas possible, je ne vais pas avoir mal au dos parce que je plante quelques fleurs de merde ? ! »
Eh bien, si, elle arrête à la cinquième se disant « Bobonne préserve-toi ».

Quand elle arrive dans la cuisine, elle a à peine le courage d’ouvrir le quotidien maudit, aïe, trop bobo dos ! C’est le début d’un terrible périple … entre quatre murs.

Si tu te retrouves à prendre des positions que tu n’aurais même pas imaginé arriver à tenir, simplement pour soulager deux vertèbres, c’est que tu es mal, couchée, les yeux révulsés, la nuque pliée, un pied touchant le sol, l’autre jambe à 90°, l’abdomen tordu, peu importe dans un sens ou dans un autre tant qu’il n’y a plus de douleur.

La Crucifixion

Clouée au lit, marcher ou s’asseoir est impossible sans d’immédiates décharges électriques fulgurantes dans la jambe qui s’endort !

Ta vie devient exactement comme quand tu es en session d’examens et que n’importe quoi d’autre te paraît plus intéressant ; tu te plonges dans la lecture d’un thriller passionnant, tu jouis d’arracher les herbes du jardin, passer l’aspirateur, voire carrément aider ta mère à repasser, tout, sauf étudier.
Eh bien, quand tu es bloquée avec une hernie discale, tu commences à rêver de faire un marathon, de battre ta copine Bernadette au tennis alors que tu n’as plus joué depuis 10 ans et l’idée ringarde de participer aux 15 km Adeps du dimanche te paraît l’activité la plus tendance du moment !
Tout juste ne trouves-tu pas que vider et remplir un lave-vaisselle, préparer un repas ou arroser les plantes sont des corvées excessivement jouissives.

Pas d’arrêt-maladie possible, heureusement de nos jours, le bureau d’un architecte peut se résumer à un PC qu’on a installé à hauteur du matelas sur une table de camping, appuyée sur le coude gauche qui s’use et bleuit, il reste la main droite ; Bobonne peut honorer ses engagements professionnels !

Puis, tu apprends que ta colonne vertébrale n’est plus qu’un assemblage d’os « osthéoporosés » et tu te dis qu’il va falloir agir ! La fée cortisone est finalement prescrite avec amélioration spectaculaire, enfin pouvoir marcher plus de 10 mètres, jusqu’aux toilettes par exemple, et s’asseoir un peu, sans hurler.

Tu la vois celle-là, c’est ta vieille petite chaise de bureau, elle a survécu alors que sa sœur jumelle non, elle a échappé aux conteneurs, comme quoi ça devait être écrit qu’elle resservirait.
Parce que oui, cette petite chaise qui a perdu un accoudoir malgré de vaines tentatives de réparation, est la seule chose sur laquelle la courageuse travailleuse se sent bien assise, l’aisselle appuyée lourdement sur le dossier et le fessier relativement confortable, la jambe pouvant s’étendre voire pousser la belle sur ses roulettes.

La Descente de Croix

Bobonne récupère doucement. Enfin, la hernie se résorbe manifestement !
Mais à tout mal un bien, bourrée de cortisone, tu subis les effets secondaires.
Les premiers sont plutôt avantageux .
Plus aucune douleur ni de l’épaule et zone environnante ni de la rotule pourtant frottant sauvagement sur le plateau tibial en désormais absence de cartilage, plus aucun bouton, une vraie peau de bébé, OK, peut-être légèrement joufflu mais ça gomme les rides  ! Que du plaisir, la cortisone devrait être prescrite à toutes les bobonnes et bonbons !
Les seconds sont moins intéressants.
Alors que Bobonne ne fait même pas 200 pas par jour et s’enfile du Netflix à tire-larigot, son appétit croît de façon inédite, dépendante, elle réclame deux repas complets par jour auprès de sa moitié qui commence à regretter d’être retraité (le jour des tagètes, si si), au moins, elle saura enfin ce que c’est d’avoir faim ! Outre la rétention d’eau, sa peau affiche paradoxalement une marbrure digne de celle d’un parchemin qu’aucune crème n’arrive à réhydrater.

Bobonne se remet à la nage quotidienne, une vraie joie de sentir ses vertèbres se dé-tasser au fur et à mesure qu’elle pénètre dans l’eau et que la loi d’Archimède fait son effet. Le temps de l’effort, trois quarts d’heure quand même, telle une sirène, Bobonne se sent légère, mince et guérie !

La Résurrection … ou pas

Est-ce le boost d’un cocktail de vitamines B nouvellement prescrit, une évolution naturelle (la hernie discale est censée se guérir seule) ou ses efforts de naïade mais au bout de deux mois de calvaire, Bobonne peut presque revivre et oser un restaurant, dûment encadrée par ses deux servants attitrés. Évidemment il faut qu’elle tombe, ne réalisant pas que ses jambes ne la portent plus aussi bien…
Heureusement, seulement des écorchures.

Aujourd’hui, muscles regonflés, tout va presque bien, encore une fragilité de L4-L5-S1 et une certaine inhibition qui pousse Bobonne à se lever d’une chaise, ou pire d’un fauteuil bas, comme si le haut allait se dévisser du bas, dépliant lentement son dos martyrisé en s’appuyant fermement, jambes et bras bien écartés, sur quelque chose de solide.

Vous voyez la caricature de la vieille* ?

C’est Bobonne.

   * Sans le poil au menton, le fichu et le tablier à fleurs.

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